L’Etat « continue de privilégier l’excellence à la réussite du plus grand nombre. »

Dans le Monde, Benoit Floc’h s’inquiète du retard de l’enseignement supérieur.

(…) « Que les étudiants, partie plutôt favorisée de la jeunesse, se mobilisent contre les conditions qui leur seront faites à l’entrée du marché du travail est extrêmement significatif. Qu’a représenté, en effet, la « priorité jeunesse » pour les étudiants ? De fait, depuis 2012, 400 millions d’euros ont été débloqués pour les bourses sur critères sociaux et 42 500 logements étudiants seront livrés d’ici à fin 2017. Ce n’est pas négligeable. Mais est-ce cela qui compte vraiment ?

Le taux global de réussite dans l’enseignement supérieur français n’est pas si mauvais : huit étudiants sur dix en sortent avec un diplôme. En revanche, les étudiants continuent d’échouer dramatiquement en licence. C’est au sein de ce premier cycle non sélectif que se trouvent les étudiants les plus fragiles et les moins bien préparés aux études supérieures. Le choix a été fait de leur ouvrir l’université sans condition. Mais, depuis vingt ans que la démocratisation de l’enseignement supérieur a commencé, l’Etat n’a pas jugé utile de financer correctement leur accueil et leur accompagnement.

Les dégâts sont énormes : seuls 28 % des étudiants obtiennent leur licence en trois ans. Si l’on compte ceux qui ont besoin de quatre ou cinq ans, la part monte à 44,5 %. La réussite en licence est une priorité pour la droite comme pour la gauche, mais l’absence de résultats est patente.

Négligence de l’État

L’Etat, en outre, n’est pas aussi généreux qu’il y paraît. Dans ses arbitrages budgétaires, il continue de privilégier l’excellence à la réussite du plus grand nombre. S’il consacre 11000 euros par an à chaque étudiant d’université, il accorde 50 % de plus aux élèves de classe préparatoire et le double à ceux qui étudient, par exemple, à l’Ecole polytechnique, c’est-à-dire ceux qui ont le moins besoin de son aide. (…)

Mais il y a plus grave. Au-delà de la négligence de l’Etat vis-à-vis de la réussite des enfants des classes modestes et moyennes, ce qui compte probablement le plus pour les étudiants d’aujourd’hui, ce sont les emplois qu’ils occuperont demain. Le débat du moment porte sur la précarité de l’emploi.

« La recherche et l’enseignement supérieur sont les moteurs de la croissance économique », rappelle Bernard Ramanantsoa dans un livre sorti il y a quelques mois (Apprendre et oser, Albin Michel). Et, rappelle l’ancien directeur d’HEC, «  il existe un écart de plus en plus marqué entre les pays qui investissent dans la recherche et ceux qui demeurent à distance de la “frontière technologique’’, déterminée par les Etats-Unis ».

Une France qui semble tétanisée

Or, la place de la France dans le paysage mondial de l’innovation est moyenne, voire médiocre. Dans le dernier « indice mondial de l’innovation », elle se classe 21e, derrière beaucoup de ses partenaires européens. (…)« D’après les chiffres de l’OCDE [Organisation de coopération et de développement économiques], écrit M. Ramanantsoa, la dépense intérieure française en matière de recherche et d’innovation la situe au quinzième rang mondial et recule nettement par rapport aux autres pays. C’est l’avenir même de notre système d’enseignement supérieur qui est en jeu. »

Dans le rapport sur la « stratégie nationale de l’enseignement supérieur » (StraNES), remis fin 2015 au président de la République, les auteurs écrivent : «  Entre 1995 et 2010, les dépenses d’enseignement supérieur ont augmenté de 50 % en moyenne dans l’OCDE, avec des taux élevés dans certains pays développés (Etats-Unis, Scandinavie, Corée…) et dans les pays dits émergents. En France, l’augmentation n’a été que de 16 %. » Si bien qu’aujourd’hui la dépense de la France pour son enseignement supérieur ne représente que 1,5 % de son produit intérieur brut (PIB), contre 1,6 % pour l’ensemble des pays de l’OCDE. Au Canada, ce taux est de 2,8 %. Aux Etats-Unis, il est de 2,7 %, en Corée de 2,6 %, au Danemark de 1,9 %, en Suède de 1,7 %.

C’est un cercle vicieux qui menace de se mettre en place, préviennent les auteurs de la StraNES. Ne pas se donner les moyens de former suffisamment d’étudiants à un haut niveau, c’est courir le risque d’une perte de compétitivité pour l’économie. « 

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/03/15/une-priorite-jeunesse-en-trompe-l-il-pour-les-etudiants_4883128_3232.html#xtLQsp5lPosMeGug.99

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