« Atteindre le plus grand nombre en mettant la barre très haut » Agnès Varda
LE MONDE
Née Arlette Varda le 30 mai 1928 à Ixelles, en Belgique, Agnès Varda fut l’une des pionnières de la Nouvelle Vague, et l’une des rares femmes à figurer sur la carte du jeune cinéma des années 1960 – avec Nelly Kaplan, qui signera plus tard La Fiancée du pirate, en 1969. Agnès Varda fut remarquée dès son premier long-métrage, La Pointe courte (1955). Sept ans plus tard, elle montait les marches du Palais des festivals, à Cannes, pour présenter son deuxième long-métrage, Cléo de 5 à 7…..
Sa famille avait fui la Belgique en 1940 et s’était installée à Sète, sur les bords de la Méditerranée, où l’adolescente a grandi puis s’est liée d’amitié avec Jean Vilar et son épouse. A Paris, elle étudia la photographie à l’Ecole des beaux-arts, et l’histoire de l’art à l’école du Louvre. En 1947, Jean Vilar fonda le Festival d’Avignon, et l’année suivante Agnès Varda débarquait avec son appareil photo. En 1951, Jean Vilar lui demanda de devenir la photographe du festival : elle immortalisa Gérard Philipe. Elle fut aussi la photographe attitrée du Théâtre national populaire (TNP) de Villeurbanne, dirigé par le même Jean Vilar….
Son premier long-métrage, La Pointe courte (1955) est tourné avec un budget réduit, au sein d’une coopérative. Quatre ans avant Les 400 Coups (1959), de François Truffaut, ouHiroshima mon amour (1959), d’Alain Resnais, cinq ans avant A bout de souffle(1960), de Jean-Luc Godard, le film d’Agnès Varda annonce la Nouvelle Vague. Un film « libre et pur », saluait ainsi André Bazin, l’un des fondateurs des Cahiers du cinéma, père spirituel de François Truffaut qui mourut un an avant la sortie des 400 Coups.
« En 1954, j’étais photographe au TNP et je connaissais peu le cinéma. Il me semblait alors que beaucoup de “révolutions littéraires” n’avaient pas leur équivalent à l’écran. Aussi me suis-je inspirée, pour mes recherches, de Faulkner, de Brecht, essayant de briser la construction du récit, de trouver un ton à la fois objectif et subjectif, de laisser au spectateur sa liberté de jugement et de participation. »
Féministe, engagée, elle signa en 1971 le « Manifeste des 343 », un appel à la légalisation de l’avortement. En 1976, sa comédie musicale, L’une chante, l’autre pas, racontait l’émancipation des femmes au tournant des années 1960-1970. …
Sans toit ni loi dissèque le destin d’une jeune fille en rupture, Mona, interprétée par Sandrine Bonnaire. Ce film social, visionnaire sur la France des sans-abri, a la froideur des statistiques. En le revoyant, on se surprend à lui découvrir une autre veine, écologiste celle-là. Macha Méril y joue en effet le rôle d’une platanologue, attentive à la santé précaire de ces arbres du Midi. Son personnage prédit la catastrophe si rien n’est fait dans les trente ans qui viennent. …
Les Glaneurs et la glaneuse, diffusé sur Canal+ le 6 juillet 2000, la veille de sa sortie en salles, est le portrait d’une époque lasse (ou incapable) de participer au grand banquet de la consommation.
Avec le cinéaste Jacques Demy, mort en 1990, dont elle a partagé la vie, l’amour et le cinéma s’entremêlèrent aussi, au point de former la trame de quelques œuvres marquantes – en 1991, Agnès Varda signa Jacquot de Nantes, d’après les souvenirs d’enfance de Jacques Demy. (extraits)
https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/03/29/la-realisatrice-agnes-varda-pionniere-de-la-nouvelle-vague-est-morte_5443036_3246.html
TELERAMA
Visages, villages (2017)
Ce pourrait être un post-scriptum aux Plages d’Agnès(2008), autobiographie, tout en inventions et bricolages, mais aussi aux Glaneurs et la Glaneuse (2000), documentaire à succès, jalonné de rencontres insolites. Voici de nouveau Agnès Varda sur la route avec ses caméras, mais, cette fois, accompagnée par un coréalisateur et partenaire à l’image : le plasticien JR, connu mondialement pour coller ses immenses photographies sur des maisons, des ponts, des monuments. Principe : l’octogénaire et le trentenaire débarquent dans des villages français et conçoivent ensemble des installations pour rendre hommage à des gens du coin — le résultat est souvent admirable.
Reçu d’Avignon :
Nous apprenons avec une infinie tristesse la disparition d’Agnès Varda.
Cette artiste aux vies multiples avait commencé son parcours comme photographe aux côtés de Jean Vilar qu’elle accompagna dès la deuxième année du Festival, en 1948, puis au TNP.
Sur le plateau de la Cour d’honneur du Festival d’Avignon comme dans les coulisses du TNP – Théâtre de Chaillot , elle avait su capter la vitalité de l’aventure de Jean Vilar et de ses acteurs contribuant ainsi à construire sa légende et à celle du Festival d’Avignon.
Nous avons eu l’immense bonheur de collaborer avec Agnès Varda une dernière fois en 2018 à l’occasion de la préparation de l’exposition « Je suis vous tous qui m’écoutez » Jeanne Moreau, une vie de Théâtre. Laure Adler, la commissaire, avait choisi de nombreuses photographies d’Agnès Varda. Les images d’Agnès, Jeanne Moreau dans la vitalité de ses 20 ans et la lumière Avignon, au côté de Gérard Philipe dans Lorenzaccio ou dans le trio de la naissance du Festival qu’ils incarnaient tous les deux avec Jean Vilar, resteront pour toujours dans nos mémoires et dans celle de nos visiteurs.
Un grand merci, Agnès, de nous avoir permis, par votre talent et votre générosité, de partager la grâce à votre regard sur les actrices, les acteurs, le théâtre et la vie.
Nous adressons nos pensées à sa famille, à ses amis et à tous ceux qui l’aimaient,
Pour l’équipe de l’association Jean Vilar
Nathalie Cabrera
Directrice déléguée