IMPRESSIONS D’AVIGNON 2014

avignonA propos de JUILLET 2014

« Bernard Stiegler, Robin RENUCCI, S’élever, d’urgence ! » de Eric Fourreau
« Mai, juin, juillet » de Denis GUENOUN, mis en scène par Schiaretti.

Soleil de plomb,  ombre douce des ruelles, cigales folles, platanes  et murs enrubannés  de guirlandes d’affiches multicolores. Pas de doute, c’est l’été. C’est Avignon et sa grande  fête du théâtre ! Fête assombrie cette année par les inquiétudes et la mobilisation ponctuelle des intermittents,  mais fête du théâtre, des spectacles et du public malgré tout. Marathon du spectacle aussi ! Difficile de décrocher une entrée dans le « IN » sur place et pas simple non plus de choisir dans les centaines de spectacles offerts dans l’énorme catalogue du « OFF ».

Mais le plaisir d’Avignon c’est d’arriver avec  un billet du « IN » en poche et de chercher sur place, au gré du vent et des envies, un spectacle, une table ronde, une lecture, une rencontre. Etre attablé rue des Teinturiers ou sur une placette ombragée, sans cesse accosté par de joyeux drilles costumés qui tractent à grand renfort de « flyers » colorés, vantant à qui mieux-mieux les plaisirs cachés de leur spectacle, Avignon, c’est déjà ça.  Des comédiens  vous abordent dans la rue, vous bousculent joyeusement, improvisent… On se laisse parfois convaincre, on glane les avis des amis des amis, on s’embarque  sur un nom, un lieu. La belle aventure au gué !

Cette année, on avait choisi Robin RENUCCI  pour son rôle principal dans « Mai, juin, juillet » et  une rencontre à la Maison Jean Vilar pour préparer les 4 heures du spectacle programmé le soir même  à 22h.

s-elever-d-urgence-de-robin-renucci-1005104563_MLLe 18 juillet à 11h du matin, le soleil cogne déjà  un max sous les voiles tendues au-dessus de la cour pavée.  « S’élever d’urgence ! ». Le beau titre de cette table ronde sur la mutation des usages culturels reprend celui de l’ouvrage consacré par Eric Fourreau au directeur des Tréteaux de France et à Bernard Stiegler. Pendant une heure, Robin Renucci va défendre avec fougue sa conception d’un théâtre qui élève le spectateur, ce qu’il applique avec conviction dans son école en Corse et dans sa compagnie, « Les Tréteaux de France ».

Comment «élever le spectateur » ? En lui montrant  simplement des signes qu’il agencera pour construire lui-même le sens qui n’est pas exposé sur scène mais présent symboliquement. Pas question pour Renucci d’envoyer brutalement des injonctions violentes qui entraîneraient une réaction immédiate et non réfléchie ne nécessitant aucune création de la part du spectateur. Puisque la grandeur de l’homme c’est de pouvoir différer ses pulsions, de ne pas y  succomber, il faut s’écarter de toute tentation de n’envoyer que des messages qui provoquent une paralysie immédiate souvent proche de la sidération si familière aux médias  accrocheurs dont c’est le fonds de commerce.

Le théâtre doit nous aider à construire du sens car la passivité ne nous élève pas.  Seul  le spectateur-acteur, débarrassé des images choc qui le pétrifient, peut avancer.  Au diable alors les spectacles, expositions, écrans qui ne cherchent qu’à épater facilement le spectateur à grand renfort d’effets  plus trash les uns que les autres et dont certains abusent sans retenue, flattant ainsi les pulsions les plus barbares.  De telles images circulent régulièrement sur Internet. Tout a été osé hélas : du sang, de l’urine, du sperme. Mais l’obscène écrase et tétanise.

Seule la symbolique permet de construire.

Il n’est pas question pour autant de rejeter les formes nouvelles de la technologie. Pas de « c’était mieux avant » mais un usage raisonné des outils nouveaux. Comme  le feu qui était pour Prométhée à la fois le poison et le remède, ces outils, s’ils modifient les rapports humains et détruisent les liens traditionnels  permettent aussi aux « assis » de se remettre en action et de se relever. « S’élever d’urgence » donc,  dans une action collective. A condition de donner les clés des outils plutôt que de remplir les têtes comme des vases trop vides.

Car, conclut Robin Renucci, nous tous, membres de la Compagnie, nous sommes des rémouleurs et nous transportons sur les chemins notre « forge ambulante » qui affûte les outils du public. Pour notre plus grand bonheur !

Alors le soir même,  impatients et curieux, nous sommes allés « affûter nos outils » à l’Opéra Grand Avignon pour la représentation de « Mai, juin, juillet »… (à suivre).

Christine Baron-Dejours

Pour lire la suite de l’article, c’est par ici…

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