RAPPORT MORAL – 29 JUIN 2009 – ASSEMBLEE GENERALE STATUTAIRE

L’année qui vient de s’écouler est pour bien des raisons une année de rupture, c’est aussi une année charnière et – peut-être – l’année d’une nouvelle dynamique. Ce rapport moral n’est pas le dernier mais notre Association se réunira dans des conditions différentes l’an prochain.

Le contexte national et international

Il est maussade en raison d’une crise structurelle, apparemment durable, marquée par le chômage ( près de 4 millions inscrits à Pôle emploi au mois de mars) et les inégalités : ceux qui ont vu le film Tokyo Sonata ont compris combien est mortifère le sentiment d’impuissance et de peur de l’avenir d’un employé licencié.

Qu’en est-il de la culture dans cette situation ? Le Président de la République a annoncé une « refondation de la politique culturelle », notamment une relance du spectacle vivant, dans son discours de janvier. En cette fin des Entretiens de Valois, la Ministre, Madame Albanel, juge utile de clarifier les missions des différentes structures et les financements de l’Etat – poursuivre une réflexion sur les labels – et de mettre en place dans chaque région des « conférences du spectacle vivant » qui rassembleraient l’Etat, les collectivités territoriales et les professionnels, pour permettre une meilleure articulation.

Mais malgré la promesse d’un dégel des crédits 2009, le Syndeac qui regroupe 250 directeurs, vient de faire part de ses inquiétudes. Le secteur culturel ne lui semble pas échapper à la crise.

A l’Association des Scènes Nationales, une majorité des 70 Directeurs veut –enfin- reprendre la main, et investir une structure qui leur permet d’échanger sur leurs pratiques et de renforcer leur réseau : les Présidents sont très intéressés par cette démarche et dès l’automne les statuts de cette Association seront modifiés.

Le contexte local

Il a été marqué par le conflit et la colère, à cause des projets de la Mairie et de l’Etat, annoncés en octobre : création d’un Etablissement Public de Coopération Culturelle responsable de la gestion du Volcan, réhabilitation des bâtiments, disparition programmée de la salle de l’Eden et du Petit Volcan.

Qu’en est-il de notre association, de ses adhérents, de son histoire ?

Le sort de notre association

Je commencerai par le sort de notre association car il nous a préoccupés et a suscité nos actions toute l’année depuis le mois d’octobre – non à cause du caractère inattendu des projets, mais à cause de l’ampleur des changements annoncés : transformer la structure juridique du Volcan au profit d’un EPCC, mais aussi restructurer les bâtiments, c’est-à-dire supprimer 2 salles de cet ensemble fortement identifié.

Pour la suppression des salles de l’Eden et du Petit Volcan, nous persistons à penser que ces opérations très chères exigent une réflexion plus approfondie : la salle de l’Eden répond à des besoins, elle mérite un engagement et un investissement de tous. Rien ne remplacera vraiment la salle modulable du Petit Volcan. En revanche, une médiathèque (dont les buts sont bien différents) peut être construite dans un autre lieu ou investir l’ensemble du forum sans toucher au PV dont l’utilisation peut être élargie.

D’autre part, confier la gestion de la Scène Nationale aux financeurs, la Mairie et l’Etat, au détriment de notre vieille Association, cela ne pouvait pas se faire sans notre accord et sans la reconnaissance de la légitimité de notre Association.

Vous avez suivi le cours de l’aventure depuis les premiers courriers jusqu’à notre démarche auprès du Tribunal Administratif grâce à l’appui de notre avocat Maître Roland Lienhardt, et les négociations entreprises sous l’égide du représentant de l’Etat.

Je retiens deux points qui me semblent essentiels :

Nous étions 250 adhérents. En décembre, beaucoup d’entre vous se sont aperçus qu’ils avaient négligé de montrer, par leur adhésion, leur attachement à la Maison de la Culture – sans doute parce que depuis 1961, elle était tellement ancrée dans le paysage de notre ville et de notre vie culturelle ! Depuis, nous avons enregistré un sursaut des spectateurs : nous sommes 450 adhérents – la même force qu’il y a quelques années -. De même, je salue ici la création d’un comité de soutien à la Maison de la Culture, et d’un Collectif « Pour la Culture au Havre ». Qu’est-ce que cela prouve ? Qu’une partie de la population exprime ainsi les liens qui l’unissent à notre vieille Maison, l’importance qu’elle accorde à la culture et sa volonté d’être entendue dans les prises de décisions.

Nos propositions ont été acceptées : si le Havre a vu en 1961, comme le disait A. Malraux, que « c’est ici que tout a commencé », notre ville a aussi initié une solution originale pour permettre à l’Association Maison de la Culture fondatrice de trouver toute sa place dans le Conseil d’Administration d’un EPCC. L’Association est intégrée aux côtés des financeurs en tant que « membre associé ». avec 3 membres du Conseil d’Administration pour représenter les publics.

Que va-t-il se passer maintenant ?

Cette Association pour laquelle nous nous sommes tant battus, nous devons la renforcer : je ne peux que vous inciter à renouveler vos adhésions, à faire adhérer autour de vous, afin que notre Association soit une force incontournable !

Son rôle culturel est plus important que jamais. Jugez-en : nous devons procéder à la modification de nos statuts

Voici, eu égards aux pères fondateurs de notre Maison et aux idéaux qui les ont nourris, les missions que notre Association peut mettre en œuvre, aux côtés de l’équipe professionnelle et au sein du Conseil d’administration de l’EPCC

Veiller

– au respect des idéaux d’indépendance, de diversité culturelle, d’ouverture au plus grand nombre et de qualité artistique sur lesquels repose le principe fondateur des Maisons de la Culture

– à l’application de ces principes en assurant la représentation des publics de la Scène Nationale auprès des gestionnaires de l’EPCC en qualité de « membre associé » au sein du Conseil d’Administration de l’EPCC

Faire connaître et promouvoir les activités artistiques développées par la Scène Nationale en générant des initiatives destinées à accroître son rayonnement

Jouer un rôle culturel de sensibilisation et de formation des publics de l’agglomération havraise, en lien avec toutes les structures culturelles

Etre un lieu de débat permettant la rencontre des spectateurs, des artistes et des acteurs culturels

Vous voyez qu’il n’est pas question que notre Association disparaisse et qu’elle a de l’ambition !

2   L’évolution du Volcan

Tout d’abord les résultats financiers : notre Trésorier vous soumettra son analyse.

Rappelons toutefois les principaux éléments qui le composent d’après la comptabilité analytique :

Le montant global des produits est de 5 680 k€ soit + 310 k€ par rapport à 2007)

Le montant des subventions de fonctionnement est de 4 460k€ (en baisse de 270 k€ mais l’apport de la Ville en nature (bâtiment), n’a pas été valorisé dans les comptes 2008, sinon le montant des subventions serait stable).

Les recettes propres et subventions affectées sont de 674 k€, soit une progression de 109 k€ par rapport à 2007.

Les charges sont en progression de 240 k€ par rapport à 2007 et s’élèvent à 5 461 k€. La masse salariale est en baisse de 264 k€. (pas sur le salaire brut mais sur la dotation aux Congés payés et aux charges liées au départ de personnel). Les charges d’activités progressent également fortement (+ 387 k€).

La conséquence de ces bons résultats est une amélioration sensible des ratios puisque le disponible pour activités passe de 28% à 33%.

Le disponible pour artistique passe de 23 à 29% 

Ainsi l’exercice est excédentaire de 219 k€. Nous proposons d’affecter ce résultat au report à nouveau de l’association et d’augmenter ainsi ses capitaux propres.

Nous nous félicitons du travail du nouvel Administrateur Rodolphe Di Sabatino qui a déposé avec succès en septembre une réclamation auprès des services fiscaux concernant l’assujettissement des subventions à la TVA.

Les perspectives qui se dessinent pour le Volcan sont un transfert de son activité à l’Etablissement Public acté par une convention de transfert qui fera l’objet d’un point particulier qui sera évoqué lors de cette assemblée générale.

D’autre part, le bilan de la saison ( le Directeur va vous le détailler )

Je voudrais replacer la situation du Volcan dans le contexte de la culture en général.

Nous faisons face à une question récurrente : la culture est-elle – toujours – réservée à une élite, qui serait familière, par son éducation et ses études, de notre patrimoine commun, c’est-à-dire des fondements de nos civilisations qui remontent à 5000 ans ?

Par ailleurs, ne sommes-nous pas à l’époque du culte de l’éphémère au détriment des lieux culturels permanents jugés trop institutionnels : le public serait volatil, fonctionnerait par tribus, rechercherait le divertissement et l’évasion dans un monde en crise.

Dans ce contexte, nous nous réjouissons d’une hausse de fréquentation.

Le Volcan a proposé 132 représentations, 58 spectacles ( 19 théâtre, 15 musique, 12 danse, 2 cirque, 10 « ornithorynques » ) :

De 24 326 spectateurs en 2006/2007, nous voici à 29 835 pour cette saison ! Ce qui signifie que les publics, anciens et nouveaux, retrouvent le chemin des salles. Près de 8000 spectateurs ont fréquenté le Petit Volcan, par exemple, salle dont nous persistons à penser qu’elle est magnifique et adaptée …

Pour les abonnements, les résultats sont plus en demi-teinte : 1947 – les 3000 abonnés de l’ère Milianti nous damnent encore le pion !

Nous nous félicitons du nouveau support de communication : le Bimestriel, dont le style humoristique et alerte est dû au Secrétaire Général Christophe Galent

Dans son travail avec les populations des quartiers classés en Zone Sensible Urbaine, le Volcan a mis en œuvre la démocratisation culturelle, facteur d’insertion sociale, de développement personnel et de lien social.

Maryse Ricouard, a permis leur sensibilisation au spectacle vivant, grâce à des tarifs préférentiels et plusieurs actions : des tables de lecture( 61 ), des ateliers d’écriture ( 28 personnes ), des actions de sensibilisation à la danse ( 50 personnes, 2 jours de formation ) et au théâtre, des ateliers de pratique artistique, l’accès aux spectacles et au cinéma. 3 796 places ont été utilisées.

Les partenaires sont les équipes d’intervention sociale de la CAF, d’animation de la VDH et mission locale, de la formation professionnelles des jeunes, d’animation du réseau associatif, les structures de santé et solidarité, les promoteurs d’action RMI, les centres sociaux.

Le projet a coûté près de 111 000 Euros, financé par les fonds spécifiques Contrat Urbain de Cohésion Sociale ( Etat /Acsé 7738, VDH /Pol Ville 7738), le Département 56 037, la CAF15 475 …)

Pour 2009, nous le regrettons, ces dispositifs disparaissent, car leur financement n’est plus assuré, ni par le Conseil Général pour des raisons budgétaires, ni par la Politique de la Ville dans le cadre du CUCS pour des motifs plus difficilement compréhensibles tant il est important dans notre ville de travailler à la cohésion sociale et à la promotion des quartiers – seule la CAF poursuit son financement.

Par ailleurs, nous pensons que l’apprentissage d’un regard ouvert et critique sur le spectacle vivant et sur le cinéma est un vecteur essentiel de la transmission 

Notons que l’année a été rythmée par des collaborations avec des établissements scolaires : conférences, ateliers, rencontres, aux lycée François 1er, J. Lecesne, au Conservatoire, à l’Université, à l’Ecole de Management, l’Ecole Supérieure d’Art, l’Unité d’Ouverture à l’Université «  Ecole du spectateur ». Le dispositif Club-Volcan qui concerne tous les lycées, a sensibilisé 200 élèves environ.

La journée « Histoire d’une passion » autour de la programmation de Pitié a rassemblé 25 enseignants. L’Exposition du Volcan numérique a séduit les professeurs d’arts plastiques.

Le Volcan inscrit ainsi son action dans les échanges intergénérationnels qui font la richesse des individus et des sociétés. Mais on peut regretter la difficulté de renouveler les relais parmi les enseignants ( beaucoup, militants, étant partis à la retraite ) .

En fait, peut-être que le spectacle vivant est un recours fort dans un monde en crise :

dans une crise de la consommation, il nous offre une expérience émotionnelle et intellectuelle, durable : souvenez-vous du « feu d’artifice » jubilatoire de Philippe Découflé –

dans une crise de l’égalité, il permet de réunir des individus, de créer du collectif : souvenons-nous de Poussières de sang, la chorégraphie de la compagnie Salia ni Seydou du Burkina Faso

dans une crise du sens, il est, comme toute fiction, une « procédure de vérité » selon le mot d’un philosophe, et offre un regard éclairant sur le réel : pensez au spectacle Littoral de Wajdi Mouawad sur les haines et les guerres que nous laissons à nos enfants.

L’Université Populaire, avec Florence Lafond et Benjamin Steck, a proposé 19 conférences : nous nous réjouissons qu’elle ait trouvé son public ( 2000 personnes ).

Pour l’Eden, les chiffres ne sont pas bons et la dégradation de la situation se poursuit : 16 684 spectateurs au 16 juin, loin des 28 527 de la saison 2006/2007. Beaucoup d’entre vous stigmatisent une communication aléatoire, une raréfaction des événements et des animations, un découragement généralisé. On se souvient pourtant de la salle pleine pour Home d’Ursula Meier ou Les bureaux de Dieu de Claire Simon.

L’Eden vient de perdre son label « Jeune Public ». Sylvie Fortin dépose un recours…

Pouvons-nous dire que seuls les spectateurs sauveront la salle ?

L’Inspecteur JR. Marchand proposait déjà en 2006 une « orientation nouvelle de l’activité de la salle » : autant vous dire que ses propositions de programmation axée sur quelques créneaux spécifiques nous plaisaient tout à fait. Attendons les résultats de sa dernière inspection.

Le Havre n’a pas un taux de fréquentation des salles de cinéma élevé : notre seul souci doit donc être la transmission d’une culture cinématographique exigeante grâce à la formation du spectateur, au travail avec les associations, et aux rencontres avec les professionnels et les artistes.

En conclusion, nous allons aborder une nouvelle saison.

Celle qui vient de s’écouler a été difficile, elle a secoué notre Association, réveillé de vieux démons, généré des conflits.

Elle a exigé de ses adhérents beaucoup de volontarisme et de solidarité.

Elle a suscité une réflexion et des débats dans la population du Havre sur ses désirs de culture et de qualité artistique.

Est-ce la fin d’une époque ? Sans doute ! C’est aussi le début d’un nouvel élan

La saison conforte la progression du Volcan Scène Nationale : la présentation de saison a trouvé des échos positifs parmi les spectateurs. Nul doute que les Havrais prouveront qu’ils aiment leurs Volcans et ce qui s’y passe.

Notre Association commence une nouvelle vie, le Volcan aussi sous la responsabilité d’autres gestionnaires…

Cette année a montré que nous avions des forces, celles de nos adhérents, celle de notre héritage mais aussi de notre volontarisme ouvert sur l’avenir. Nul doute que nous jouerons longtemps notre rôle de « veilleur ».

Et la culture n’a peut-être jamais eu un rôle aussi important : beaucoup d’initiatives semblent le ferment d’une « nouvelle utopie culturelle » après l’ère « Malraux »

Soyons des acteurs !

Ecrivons le mot Culture avec une majuscule

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