RAPPORT MORAL 2023
Bonjour à tous,
Bienvenue à toutes et à tous, nous sommes heureux d’être ensemble !
Depuis 2009 notre association a poursuivi ses activités dans l’esprit des fondateurs de la MCH en 1961. Elle est devenue un espace de rencontre de spectateurs passionnés, déterminés à œuvrer pour une démocratie culturelle. Selon nous, et pour beaucoup, les arts et la culture ne sont, ni réservés à quelques-uns, ni un simple divertissement qui nous détournerait du monde dans lequel nous vivons.
Ne sommes-nous pas dans un monde troublé, même si la pandémie de covid 19 s’éloigne ? L’inflation, les bouleversements climatiques, la crise énergétique, la fragilité et la remise en cause de nos démocraties, la guerre en Ukraine et ailleurs, sont sources de difficultés et d’anxiété.
« Les inégalités entre les classes sociales demeurent aiguës », selon l’Observatoire des inégalités, publié jeudi 8 juin. Louis Maurin, directeur de cet organisme indépendant, l’affirme : « Ce rapport s’inscrit dans un contexte paradoxal, avec, d’un côté, une amélioration de l’emploi depuis 2015 et, de l’autre, une forte inflation et un risque de déclassement pour les salariés peu qualifiés qui subissent de fortes pertes de pouvoir d’achat ». A commencer par les dépenses courantes ; le risque de radicalisation violente est bien présent.
Nous en sommes d’autant plus légitimes et volontaristes ! Car n’est-ce pas l’éducation, le savoir, la culture, et le travail collectif qui peuvent nous « sauver » ?
Notre équipe réfléchit collectivement à nos projets, à leurs buts et leurs sens, parfois énergiquement, mais animée d’un réel souci d’efficacité. Je l’en remercie !
Ainsi l’année 2022 a été pour nous une année de reprise.
Nous avons, avec un grand plaisir, accueilli de nouveaux adhérents !
Nos administrateurs vous présenteront le rapport d’activité. Pour l’essentiel, je voudrais signaler certaines de nos actions.
Tout d’abord des nouveautés :
Catherine Désormière a dû affronter des difficultés décourageantes à cause de la
pandémie – son travail de préparation de la Grande conversation « Qui sont nos zombies ? » a souffert des confinements et c’est en visio-conférence que nous avons pu suivre ce débat, passionnant par ailleurs ! Notez le lien https://asso-maisondelaculture.fr/grandes-conversations/11eme-grande-conversation
Nous avons relancé nos conversations en public: Eric Charnay a commencé une série « les acteurs culturels face au défi de la transition écologique ». La première a eu lieu en novembre lors du salon Réinventif avec le directeur du Tetris et le directeur des affaires culturelles de Montivilliers. Les prochaines se monteront en collaboration avec le master « ingénierie touristique et culturelle » de l’université du Havre
Et cet automne, nous vous proposons une Grande conversation intitulée « Femmes (in)visibles. La représentation des femmes dans l’art et dans la vie culturelle ».
Nous avons enrichi notre émission VIVA CULTURE sur Ouest-track radio grâce à
un Instant poésie présenté par Mathieu Amans et un Instant ciné animé par Corinne Saunier. Notre association est toujours active à travailler aux liens entre les créateurs, les œuvres et des publics.
Nous avons inauguré VIVA SUR SCENE une émission d’Entretiens après spectacles avec des metteurs en scène ou/et des comédiens. Les artistes apprécient ces retours dont ils manquent parfois.
Cette saison, nous avons mis en place un Bistrot culture mensuel tout à fait
réjouissant. La première séance a été l’occasion pour quelques adhérents de faire connaissance avec la nouvelle directrice du Volcan, Camille Barnaud. Elle a constaté que nous connaissons bien le tissu culturel havrais, riches de nos curiosités et de nos réseaux, et que nous sommes engagés dans le partage le plus possible de nos expériences artistiques.
Plus généralement, de façon tout à fait intéressante, nous réfléchissons aux œuvres et parfois nous analysons les difficultés rencontrées ailleurs par les créateurs, comme la censure : Miriam Cahn a été prise à partie à propos d’une de ces œuvres sur la guerre en Ukraine, au Palais de Tokyo. Constance Rivière, directrice du Musée national de l’histoire de l’immigration a signé une tribune publiée à cette occasion, et affirme : « Si l’on commence à entrer dans l’autocensure, dans la peur de déplaire, à choisir les artistes pour autre chose que pour leur talent, on va contribuer à un affaiblissement de la participation des lieux culturels et artistiques au débat public. L’art, ça dérange. Moi, je peux être dérangée par certaines œuvres, y compris certaines que l’on expose ici. »
Des constantes : notre association est particulièrement sensible aux inégalités sociales et culturelles.
Aussi l’opération Musique pour tous est-elle particulièrement judicieuse (cf les
documents).
Une inquiétude porte sur les moyens donnés aux acteurs culturels : beaucoup de
collectivités locales, dont la ville du Havre, baissent considérablement leurs subventions.
En ce qui concerne notre association, la mise de départ importante que nous avions obtenue en 2010 lors du transfert des activités de l’association à l’établissement public le Volcan, s’amenuise.
Moment délicat pour trouver de nouvelles ressources puisqu’Etat et collectivités locales réduisent leurs aides.
Heureusement pour notre opération Musique pour tous, E. Charnay et V. Daumont font appel avec succès à des mécènes. Pour nos grandes conversations, si nous pouvons compter sur la ville du Havre via les responsables de la bibliothèque Niemeyer pour mettre ce lieu gratuitement à notre disposition, ce qui n’est pas négligeable, d’autres frais sont à couvrir, comme la rémunération et le défraiement des intervenants. Comment y parvenir ? Vente de nos cartes postales ? Prix d’entrée au moins pour les non-adhérents ? »
Nous nous posons toujours des questions fondatrices comme l’accès de tous à
l’art. En fait la fracture sociale est visible dès le plus jeune âge, à l’école primaire. « Nous avons un système scolaire marqué par un élitisme social, qui favorise davantage les enfants de diplômés que les autres », dénonce Louis Maurin.
Michel Guerrin du journal Le Monde, souligne le mal de chien que se donnent les musées ou les théâtres pour diversifier leur public.
Les jeunes directeurs et les artistes d’aujourd’hui nous offrent, je cite Camille Barnaud, « des spectacles fédérateurs mais aussi des temps forts dédiés à la création contemporaine la plus audacieuse ». Ils ont envie de réinventer les rapports entre publics et artistes, de bousculer la relation entre la scène et la salle obscure. Le public sera invité à participer davantage. Nous avons choisi des Bons plans variés, permettant des découvertes.
Peut-être serons-nous étonnés, dérangés, choqués, éblouis ?
Ecoutez en podcast Viva sur scène avec Marie Courtel-Emond, secrétaire générale du Volcan.
Pensons aux « nouveaux publics » étudiés par le sociologue Aurélien Djakouane. Notre association regroupe des spectateurs actifs par goût des arts et de la culture, les jeunes générations à l’ère numérique, comme l’évoque Laurence Allard (à propos de la culture du remix), expérimentent « le passage d’une culture comme bien à une culture comme « lien ». En effet, l’utilisation des réseaux sociaux révèle une double dimension des cultures adolescentes : le travail en équipe et le besoin d’un public.
Vous remarquez chez vos enfants ou vos petits-enfants des aptitudes nouvelles : ils rebondissent d’une idée à l’autre, passent d’un document à l’autre grâce à un système de liens – sur le modèle d’internet. Rien à voir avec notre éducation, cartésienne, linéaire, dissertative…
Aurélien Djakouane analyse des changements dans les apprentissages. Si l’on fait le pas d’appliquer ce schéma à la participation culturelle, on s’aperçoit que la place du public change, elle n’est plus passive. L’offre institutionnelle ne peut plus être hiérarchique, descendante ! Peut-être la saison qui commence au Volcan et dans les différents lieux culturels sera-t-elle comme la découverte d’un continent nouveau ?
C’est une chance !
Isabelle Royer