OBSERVATOIRE DES POLITIQUES CULTURELLES
LA CULTURE : UN SUJET POUR LES PRÉSIDENTIELLES ?
Si la culture n’est plus un enjeu électoral de première importance, est-elle pour autant absente des débats des présidentielles 2022 ? Dans un contexte international inédit, où la guerre en Ukraine relègue au second plan l’élection phare de la vie politique française, la culture peut-elle (doit-elle) trouver une place dans la campagne ?
« Longtemps marqueur de gauche, l’exigence d’émancipation par les arts a disparu des axes des prétendants à l’Élysée », remarquait Sylvia Zappi le 28 janvier pour Le Monde. Benoît Grossin notait, sur France Culture, des propositions « soit absentes, soit simplement évoquées ou embryonnaires, rarement développées ». Les axes forts des programmes s’inspirent des revendications portées par les professionnels de la culture, comme la priorité donnée à l’éducation artistique et culturelle, des revenus plus justes pour les artistes-auteurs, un soutien à la nouvelle création, la promotion de la diversité culturelle face à l’uniformisation de la culture dans le monde, le 1 % pour la culture…
Toutefois, Hélène Girard, dans La Gazette des communes remarque de vastes écarts entre les programmes des candidats « de la page blanche à plusieurs dizaines de mesures ». Qu’en pensent les votants ? Si les Français sont globalement « fiers de leur culture », ils ont du mal à se représenter ce qu’est « une politique culturelle », comme en témoignent les résultats du sondage réalisé pour Le Journal des Arts sur les « candidats préférés des Français pour la culture » .
Pourtant, la culture est au cœur de controverses médiatisées dans cette campagne qui se cristallisent autour de l’obsession de candidats de l’extrême droite pour le « combat culturel » avec la mise en avant de polémiques relatives à la pensée woke, ou la théorie du « grand remplacement ». Autre exemple : Fabien Roussel qui se pose en ardent défenseur de la viande, décrite comme un incontournable de l’identité française. Il « fait du cholestérol une arme de guerre culturelle » commente Christian Salmon dans Slate.
Mais si la culture existe bel et bien dans les discours, il n’est pas question pour autant de politiques culturelles dans ces controverses. Vincent Guillon, cité par Antoine Pecqueur dans Alternatives économiques, souligne ce paradoxe à propos d’Éric Zemmour : « un écart paroxystique entre d’un côté la mise en avant des thèmes culturels […] et une faiblesse dans l’approche des politiques culturelles en tant que telles ». Michel Guerrin, dans son dernier billet, dénonce un « climat privilégiant les concepts, postures, symboles et idées générales », une « culture de décor » qui n’est pas en phase avec le paysage culturel réel. Les candidats à la présidentielle semblent éviter les questions taboues, comme le non-retour du public dans les lieux culturels depuis leur réouverture, ou d’autres questions « urgentes, mais moins glamour que d’évoquer des valeurs ou de répéter que la culture est essentielle ».
Du côté des réseaux d’acteurs culturels et des collectivités territoriales, plusieurs tribunes ont vu le jour, sous forme d’adresse aux candidats à la présidentielle. L’Observatoire les a regroupées dans une note. Tous plaident pour une ambition politique forte prenant en compte les grandes évolutions de notre société. « Sans renouveau culturel, pourquoi se bat-on ? » titre le plaidoyer d’un collectif issu de la culture et du numérique paru dans L’Obs. La FNCC, quant à elle, souligne que les collectivités territoriales assument deux tiers des financements des politiques culturelles et invite à « franchir une nouvelle étape dans la décentralisation» à travers un « droit à l’expérimentation culturelle territoriale ».
« Dans ces moments tragiques où la sauvagerie est à l’œuvre pour museler ceux qui résistent », la culture « doit être l’objet de toutes nos attentions » martèle le cinéaste Frank Cassenti, dans Le Monde, déplorant qu’une question aussi essentielle soit absente des programmes. À quelques jours du vote, les candidats réussiront-ils à faire preuve d’un peu d’audace ?
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