Les politiques culturelles seraient-elles rattrapées par la politique ? L’Observatoire, dans son dernier numéro, s’attache à prendre le pouls, à hauteur des villes, de nouvelles manières de fabriquer des politiques culturelles. « Que ce soit à travers la transition écologique, le renouveau de la participation, les modalités innovantes de l’action publique, l’affirmation de nouveaux acteurs : une dynamique de repolitisation des politiques culturelles » est à l’œuvre, ainsi que l’énonce Guy Saez dans son propos introductif.
« En se penchant sur les villes, on s’intéresse […] à la colonne vertébrale des politiques culturelles » constate Vincent Guillon. Celui-ci met en exergue les mouvements et tensions qui traversent actuellement les politiques culturelles municipales. La densification d’équipements et d’évènements culturels, confrontée à la limite de sa saturation budgétaire, « rend difficile l’intégration de nouveaux acteurs et de nouvelles demandes sociales » souligne-t-il.
Comment, dans ce contexte, les villes peuvent-elles lancer de nouvelles initiatives ? La revue met en lumière le tournant participatif qui illustre un aspect de cette repolitisation. Agathe Ottavi relate l’accompagnement mené auprès de quatre villes pour le programme Territoires en commun porté par l’ANCT qui consiste à « imaginer des politiques culturelles municipales participatives ». Le numéro fait la part belle aux exemples rennais : ainsi Rachel Fourmentin, DAC de la ville de Rennes, décrit « la culture du dialogue, de la coopération et de l’expérimentation propre à ce territoire ». Une ambition illustrée par le projet que conduit Corinne Poulain aux Champs Libres : « un équipement ouvert à tous et tolérant à la coexistence d’usages parfois très différents ».
Le label « Capitale française de la Culture » témoigne également de l’évolution qui travaille les politiques culturelles des villes avec un titre qui entend promouvoir les villes moyennes. Françoise Benhamou se penche à ce sujet sur ce que le concours révèle du positionnement culturel de ces villes moyennes. De son côté, Mariette Sibertin-Blanc s’intéresse à la stratégie culturelle des petites villes et à la notion de « bien vivre territorial ». La proximité, la facilité d’accès, le réseau de connaissances ou l’accessibilité à la nature qu’elles permettent en font des modèles réconfortants, notamment dans des moments de crise. Sabine Rozier développe, quant à elle, la manière dont les villes sont de plus en plus enclines à se tourner vers le mécénat pour faire vivre leur territoire sur le plan culturel. Guy Saez explore le principe de conditionnalité auquel les villes s’adaptent et dont le chercheur pointe les limites : « Dès lors qu’on entre dans le champ de la politique culturelle, qui implique nécessairement subventions et/ou reconnaissance officielle, on ne peut échapper aux conditionnalités. La création est libre, « sous conditions » ».
Enfin, en quoi la vision portée par les droits culturels et l’arrivée d’équipes municipales écologistes chamboulent-elles les fondements de la gouvernance culturelle des villes ? Pour Philippe Teillet et Emmanuel Négrier : « L’élection de maires écologistes a en partie renouvelé les formes d’investissement des équipes municipales concernées, qui ne se sentaient pas totalement liées par un héritage d’interventions, d’institutions et de valeurs, ». Les droits culturels font leur chemin, que ce soit à Rennes où ils jouent un rôle central dans l’élaboration des politiques culturelles ou à Villeurbanne, fraîchement élue « Capitale française de la culture ». Le projet de la ville entend construire « un nouveau rapport avec les générations les plus jeunes » en leur donnant « les clés du camion ». Du côté de la transition écologique, Pascale Bonniel-Chalier conclut son article par une ambition « Comment faire évoluer les politiques culturelles à l’aune d’une nouvelle matrice qui ne sépare pas nature et culture ? »
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