Pour que le théâtre puisse vivre…

Directeur des Tréteaux de France et président de l’ACDN (Association des Centres dramatiques nationaux), Robin Renucci estime notamment que le soutien par l’État “des intermittents du spectacle et des auteurs est essentiel pour que le théâtre puisse vivre”.

Les écrans et les réseaux ont permis à certains, pas tous, de garder un lien avec la culture pendant la période du confinement. Mais reconstruire, ce n’est pas prendre acte de la capacité de l’informatique et des technologies de l’information à apporter à domicile l’art, comme on livre des pizzas, ni à juxtaposer des solitudes pour faire un commun virtuel….

Il n’y aura pas de reconstruction sans partage des œuvres, ensemble, dans un même endroit, pour que quelque chose advienne.

Cette crise n’est pas seulement une crise sanitaire et économique, mais aussi une crise spirituelle. Le risque du repli sur soi est grand pour beaucoup d’entre nous.

L’accompagnement va au-delà de l’aspect financier. Il est la traduction d’un projet de société donnant à la culture un rôle moteur, d’abord dans le domaine de l’éducation. Il s’agit de faire de l’éducation artistique et culturelle une réelle priorité.

La crise sanitaire doit être l’occasion de réaffirmer un besoin d’art à l’école, à la fois pour des raisons d’équilibre psychique de la jeunesse, et en vertu de la nécessité, impérieuse, de nourrir les imaginaires après le confinement.

La mise en place d’un tel plan n’est qu’un des éléments nécessaires d’une politique publique de l’art. Une politique d’éducation artistique et culturelle s’appuie forcément sur un vrai soutien à la création, l’une ne peut fonctionner sans l’autre.

Nous avons besoin d’un plan d’urgence à la hauteur des circonstances : maillage des territoires, soutien aux associations par l’aide à l’emploi, formation initiale et permanente des enseignants, soutien à la pédagogie de projet et à l’éducation transversale, chantiers de recherche interdisciplinaires dans les établissements : autant d’éléments qui sont ceux d’une pédagogie nouvelle que portent, en France, nombre de ceux qui font l’école. La société civile est en avance sur les décisions politiques : écoutons-la ! Nous ne pourrons désormais faire confiance qu’à ceux qui nous font confiance…

Robin Renucci dans TELERAMA

Réclusion des aînés, mensonges, infantilisation… Ariane Mnouchkine ne cache pas son indignation face aux couacs du pouvoir. Et la directrice du Théâtre du Soleil milite pour que l’art vivant, essentiel à la société, ne soit pas oublié.

Nous réfléchissons : après le déconfinement, comment faire ? Comment reprendre le théâtre, qui ne se nourrit pas que de mots mais surtout de corps ? Quelles conditions sanitaires mettre en œuvre sans qu’elles deviennent une censure insupportable ? Masques, évidemment, distanciations physiques dans les activités quotidiennes telles que les repas, les réunions, mais en répétition ? Se demander comment faire, c’est déjà être, un peu, dans l’action….

Quand je vous parle de la société, je vous parle de théâtre ! C’est ça le théâtre ! Regarder, écouter, deviner ce qui n’est jamais dit. Révéler les dieux et les démons qui se cachent au fond de nos âmes. Ensuite, transformer, pour que la Beauté transfigurante nous aide à connaître et à supporter la condition humaine. Supporter ne veut pas dire subir ni se résigner. C’est aussi ça le théâtre !

Ariane Mnouchkine dans TELERAMA

À l’Odéon occupé, la culture entre en résistance

Depuis jeudi 4 mars, une cinquantaine de professionnels de la culture occupe le théâtre national de l’Odéon. D’abord confidentiel, l’événement prend de l’ampleur à tel point que la ministre Roselyne Bachelot s’est rendue sur place samedi soir.

Jeudi 4 mars : le monde du spectacle manifeste dans les rues d’une trentaine de villes en France pour réclamer, une nouvelle fois, la réouverture des lieux culturels. (…) Le lieu est un refuge depuis plus de cinquante ans : investi en mai 68 par des artistes et intellectuels, puis en 1992 et 2016 par des intermittents du spectacle opposés aux réformes de leur régime d’indemnisation chômage, c’est bien depuis l’Odéon que le monde de la culture entre en résistance.

« Culture sacrifiée », « gouvernement disqualifié », « six chômeurs sur dix non-indemnisés », peut-on notamment lire en arrivant sur la place jeudi après-midi. … Dès jeudi soir, à l’intérieur du théâtre, les occupants détaillent la liste de leurs revendications. A la ministre Roselyne Bachelot, ils demandent la prolongation de l’année blanche, octroyée aux intermittents du spectacle jusqu’au 31 août 2021. « Non seulement certains sont exclus de ce dispositif, mais il n’était valable que si le travail avait repris normalement en septembre dernier, explique Denis Gravouil, le secrétaire de la CGT Spectacle. Ce n’est évidemment pas le cas ». Les militants veulent aussi peser sur la mission de « diagnostic » de l’année blanche actuellement menée par l’économiste André Gauron, à la demande du gouvernement. Enfin, ils entendent réclamer un effort budgétaire pour accompagner la réouverture, et la tenue d’un conseil national des professions du spectacle, histoire d’être sûrs qu’on les écoute au plus haut niveau : Jean Castex, sinon rien. « Notre ministre de la culture n’a de toute évidence aucune influence politique sur ce gouvernement », souligne d’ailleurs un communiqué de soutien envoyé le lendemain par Christophe Honoré et son équipe.

Samedi 6 mars. Sur le parvis de l’Odéon, l’heure est à la déambulation, aux prises de parole et à la poursuite de la lutte. Les jeunes artistes et metteurs en scène du collectif On Ouvre ont rallié la place et déployé les couvertures de survie dorées qui servent désormais d’emblème à chacune de leur manifestation. (…) Aux alentours de 22 heures, Roselyne Bachelot s’installe donc à la table avec eux, sur la scène même de l’Odéon. Mais Roselyne Bachelot a beau redire son objectif de protéger l’emploi artistique et promettre de poursuivre les échanges, le compte n’y est pas, estiment les locataires temporaires du théâtre. « Nous poursuivons l’occupation dans l’attente de réponses concrètes », écrivent-ils dans la foulée de l’entrevue.

Dimanche 7 mars. « On veut travailler et on veut des droits sociaux » : Denis Gravouil ne parle pas que du monde de la culture lorsqu’il prend la parole sous le soleil qui resplendit au-dessus d’un parvis de l’Odéon où se presse, aujourd’hui encore, une foule compacte. La mobilisation initiée jeudi 4 mars avec l’occupation du théâtre monte en puissance et fédère doucement mais sûrement d’autres revendications. Étudiants précaires, médecin urgentiste, militant d’Act Up, syndicat CGT des gaziers et électriciens parisiens, grévistes de l’hôtel Ibis des Batignolles… : celles et ceux qui se succèdent aux micros affluent de tous les horizons. La lutte des professionnels de la culture est-elle en passe de faire boule de neige ? (…)

Les 10 et 11 mars, les directeurs des Centres dramatiques nationaux se réuniront en Assemblée Générale pour étudier les modalités de leur mobilisation à venir. Le 8 mars, toutes celles et tous ceux qui battront le pavé parisien pour la Journée de la Femme, sont invités à rallier l’Odéon. Jean Castex, pour sa part, continuer de jouer les absents. Il ne s’est pas annoncé au Conseil National des Professionnels du Spectacle, qui se tiendra avec Roselyne Bachelot le 22 mars. Cette demande n’étant pas exaucée, l’Odéon restera occupé. Il est le seul à ce jour. Mais demain, combien d’autres deviendront la scène prise d’assaut par une colère dont le périmètre s’accroît de jour en jour ? Occupez les lieux de culture ! C’était le mot d’ordre de ce dimanche 7 mars.

Joëlle Gayot et Sophie Rahal pour TELERAMA

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