VOL DE NUIT
L’avion, dans la nuit ne se distingue guère des autres modes de locomotion. Il va, dans le ciel noir, droit son chemin sur d’invisibles rails. Les réacteurs font leur bruit de moteur, bien régulier et qui rassure. Par les hublots on ne voit plus rien, ni les nuages – “les merveilleux nuages” comme jamais ne les vit Baudelaire – ni dans les trouées de ciel bleu, les champs, les forêts, les villages, les fleuves et les routes. Et l’on ne sait plus rien de la vertigineuse hauteur sur laquelle, tout à l’heure, l’on hésitait à se pencher.
Pourtant, la situation reste ce qu’elle est. Trop solennelle pour que l’on puisse trouver le sommeil. Et si l’on tentait d’oublier tous ces dangers tant redoutés, les menues turbulences qui secouent l’appareil, le traversent de légers spasmes, suffiraient à ramener de terribles appréhensions.
Mais bientôt, on amorcera la descente. On retrouvera, rassurante la terre des hommes ; s’affichant comme sur un immense écran lumineux, les lumières des cités, la piste balisée de l’aéroport. Et on imagine, tout en bas, quelque gamin, le nez en l’air, occupé à regarder, comme naguère l’on faisait, notre pauvre machine clignoter dans cette immense obscurité.
Yoland SIMON in Fichue Météo