L’organiste André Isoir vient de mourir.

Renaud Machart rend hommage à  André Isoir, qui est mort, le 20 juillet, le même jour qu’il était né, en 1935, et parlait, « disait » comme personne la musique d’orgue du baroque français.

Il la possédait – tout en la laissant libre, merveilleux paradoxe – et la magnifiait comme personne, au début des années 1970, lorsqu’il grava, pour le label Calliope, ce qui demeure encore aujourd’hui la plus extraordinaire version du Livre d’Orgue, de Nicolas de Grigny (1672-1703) – un sommet de la littérature organistique du Grand Siècle, que Bach, admiratif, recopia intégralement à la main.(…)

Isoir jouait les récits de cromhorne, de tierce (en taille), de nazard – ces jeux dont les noms disent le son –, avec une éloquence sans pareille. Si, parmi les « baroqueux » de l’époque, les violonistes avaient joué comme Isoir jouait, si les chanteurs avaient chanté comme Isoir chantait, si les continuistes avaient fourni leur harmonie comme il fournissait la sienne, on aurait gagné une bonne dizaine d’années.

Michel Chapuis (né en 1930), à la même époque, dans ce répertoire, n’avait pas cette vocalité dans les doigts ; pas même l’artiste formidable Odile Bailleux (née en 1939). On ne voit, dans le paysage organistique d’alors, que Xavier Darasse (1934-1992), son contemporain, et Jean Boyer (1948-2004), son cadet, pour approcher son talent.

« Que de couleurs, de libertés audacieuses ! »

Mais André Isoir ne jouait pas que la musique baroque française. Il a signé – toujours pour Calliope – l’anthologie, Le Livre d’or de l’orgue français, qui allait jusqu’à Messiaen, qu’il ne jouait pas et avait laissée aux bons soins des doigts de son confrère Louis Thiry. Et, entre autres, une intégrale de la musique de Jean-Sébastien Bach.

Son collègue Vincent Warnier, organiste titulaire de l’église Saint-Etienne-du-Mont, à Paris, nous a confié à ce sujet : « Formé dans une esthétique différente d’Isoir, surtout concernant l’interprétation de Bach, je reste admiratif de son intégrale commencée dans les années 1970. Que de couleurs, de libertés audacieuses concernant les tempi et les articulations ! Il n’hésitait pas à arranger certains passages pour en tirer un effet encore plus saisissant (en remplissant les accords, en ajoutant de vertigineux continuos dans les chorals). Il connaissait toutes les ressources expressives de l’instrument-orgue, il en maîtrisait tous les potentiels acoustiques. Ce n’est pas le moindre héritage de cet artiste-artisan de génie. »

André Isoir était un homme à la curiosité insatiable. Il jouait les grands noms mais dénichait parfois d’improbables icunables. Au concert, il n’était pas toujours d’une impeccable propreté d’exécution. Mais, dans ses meilleurs moments, il avait un accès direct au plus haut de cieux.(…)

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/disparitions/article/2016/07/21/la-mort-de-l-organiste-andre-isoir_4972664_3382.html#w2p71uzlPJFE02JG.99

 
Sa discographie compte plus de soixante enregistrements, son palmarès de nombreux prix (dont trois Premier prix d’improvisation du prestigieux concours de Haarlem). Benjamin François a consacré une émission à ses transcriptions de Bach, disponible à la réécoute, et lui rendra hommage dans Sacrées Musiques dimanche 4 septembre. (France Musique)

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