La beauté esthétique relève à la fois de la raison et de l’émotion.

Les dessins pariétaux découverts dans la grotte Chauvet, qui datent de 35 000 ans avant J-C , montrent qu’Homo Sapiens cherche déjà un sens, une symbolique produite de l’art que viendront conforter d’autres découvertes.

Y a-t-il un progrès dans l’art depuis ces temps lointains ? Qu’est-ce que la notion de beau ? La recherche scientifique menée par Jean-Pierre Changeux, neurobiologiste depuis de nombreuses années se porte sur les phénomènes neurologiques de la contemplation de l’œuvre d’art et de la création artistique.

Déjà avec Pierre Boulez et Philippe Manoury il a exploré les voies de l’émotion et de la raison en musique dans un livre intitulé Les neurones enchantés. Le cerveau et la musique (Odile Jacob, 2014)

Dans son dernier livre La beauté dans le cerveau (Odile Jacob, 2016) il s’agit de l’œil, de ses mouvements incessants pour jauger le tableau à l’aune de l’histoire de l’art, de la nouveauté et du plaisir esthétique.

De nombreux créateurs avancent puis reculent en zig zag avant d’avoir le sentiment que le tableau est fini, que l’œuvre est terminée. Y a-t-il de l’aléatoire dans le geste, peut-être. En tout cas accepter ou corriger c’est le pouvoir de l’artiste.

 Intervenants
    • Jean-Pierre Changeux : Neurobiologiste, Professeur Honoraire au Collège de France et à l’institut Pasteur. Membre de l’Académie des Sciences
    • https://www.franceculture.fr/emissions/les-discussions-du-soir-avec-rene-frydman/quand-la-pensee-symbolique-apparait-elle-chez

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Pour lui, dès les fresques de Chauvet ou Lascaux réalisées par Homo sapiens, « l’activité artistique semble avoir précédé l’émergence de la connaissance rationnelle ». Plus encore, l’activité esthétique est aux fondements de la nature humaine.

Une vision biologisante, voire mécaniciste, de notre intelligence ? Jean-Pierre Changeux s’en défend:

Notre cerveau est certes une machine, mais sa complexité et son adaptabilité sont celles d’un organisme dynamique en constante évolution. Avec ses 100 milliards de neurones assemblés en réseaux, qui eux-mêmes forment des réseaux de réseaux, et ses 600 millions de synapses par millimètre cube, il possède une variabilité illimitée.»

Ainsi, devant un tableau, la couche sensible de notre rétine répond aux couleurs, chacune «excitant» des bâtonnets de largeur différente. Ces données sont transmises par impulsion via les nerfs optiques (ou auditifs lorsqu’il s’agit des sons enregistrés par la cochlée dans l’oreille interne) au thalamus, puis jusqu’aux aires du cortex spécialisées, les unes dans le traitement des couleurs, les autres dans l’analyse des formes ou encore du mouvement. Ensemble, ces aires projettent alors dans le cerveau une étonnante «image neuronale» du tableau…

A cette recomposition intérieure viennent instantanément se combiner nos souvenirs, nos représentations.

 S’inspirant d’analyses de tableaux, de Vinci à Watteau en passant par Duchamp ou Soulages, et de propos de créateurs, le chercheur formule cette hypothèse.

La nouveauté d’une œuvre d’art, son pouvoir évocateur, sa valeur émotionnelle, entraînent un embrasement extraordinaire qui envahit notre espace conscient par sa globalité. Sa puissance mobilise les émotions avec une telle force qu’on peut imaginer une ignition “explosive” de la conscience, unissant système visuel, cortex préfrontal – le siège de la rationalité – et système limbique, cette région profonde du cerveau, siège des émotions primaires.»

Le syndrome de Stendhal qui fit vaciller l’écrivain au sortir de la basilique Santa Croce à Florence, après avoir découvert les fresques de Giotto, ne serait qu’une expression extrême de ce choc esthétique dont la violence laisse épuisé. Véronique Radier

http://bibliobs.nouvelobs.com/idees/20161208.OBS2373/ce-que-l-art-fait-a-notre-cerveau.html

Après être entré dans la basilique Santa Croce de Florence, où reposent des personnages illustres tels que Michel-Ange, Alfieri, Machiavel et Galilée, Stendhal demande à voir les fresques du peintre Volterrano sur le plafond de la chapelle située à l’angle nord-est de la basilique. Il nous raconte : « (…) les Sibylles du Volterrano m’ont donné peut-être le plus vif plaisir que la peinture m’ait jamais fait. J’étais déjà dans une sorte d’extase, par l’idée d’être à Florence, et le voisinage des grands hommes dont je venais de voir les tombeaux. Absorbé dans la contemplation de la beauté sublime, je la voyais de près, je la touchais pour ainsi dire.

« J’étais arrivé à ce point d’émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les Beaux Arts et les sentiments passionnés. En sortant de Santa Croce, j’avais un battement de cœur, la vie était épuisée chez moi, je marchais avec la crainte de tomber. » — Rome, Naples et Florence, éditions Delaunay, Paris – 1826, tome II, p. 102

 

 

 

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