Amédée2

Amédée, une pièce de Côme de Bellescize

De l’âme et du corps, techniques de mise en scène

La Compagnie du Théâtre du Fracas a présenté Amédée, une pièce de Côme de Bellescize, à L’Entrepôt. Rien de racoleur dans le titre qui ne dévoile pas le propos. Les proches appellent simplement le protagoniste principal Am’, diminutif dont on se dit qu’il est magnifiquement pertinent. En effet, l’adolescent Am’ adore les jeux vidéo, au point que virtuel et réalité ne font guère de différence dans ses plaisirs, jusqu’à l’accident de voiture. Le camion était bien réel ! Le jeune conducteur passe plusieurs mois dans le coma, puis en rééducation après un réveil épouvanté dans un corps entièrement paralysé. Seul l’esprit d’Am’ est vif bien que désespéré. L’ordinateur devient une aide sur impulsion d’un de ses doigts pour communiquer. On se souvient du livre Le scaphandre et le papillon de Jean-Dominique Bauby.

L’entourage est bienveillant, le pompier, (Eric Challier, poignant) ému par la ténacité de ce si jeune accidenté exhalant des bulles de sang rose, sa mère, son copain, sa petite amie, mais aussi les soignants.

On pense aux cas de tétraplégiques dont la tragédie a nourri des débats médiatisés sur la définition de la vie, de la souffrance et l’euthanasie. On craint le pire. Heureusement le metteur en scène fait œuvre de théâtre grâce à la scénographie judicieuse de Sigolène de Chassy, et il ne tranche pas le débat. Comment rendre sensible la vie intérieure d’un être emprisonné dans son corps ? Une cage (quel à-propos !) en mousseline permet un dédoublement judicieux de l’espace, inspiré par les thèmes d’opposition virtuel/réel, esprit/corps, fantasme/réalité…Le corps d’Amédée est parfois remplacé par un mannequin, permettant au comédien de mener une vie fantasmée. Un écran projette aussi parfois ses pensées. Un double imaginaire Clov (Teddy Melis, aussi vif que Benjamin Wangermée joue un Amédée atone) est inventé, qui le soutient dans ses combats, tous marqués du sceau de l’impuissance et de la frustration. Grâce à ces oppositions, nous appréhendons la force de l’instinct de survie et de l’esprit, mais aussi son tragique isolement : ni les efforts du jeune homme pour communiquer, ni l’affection des siens, ni la constance du personnel hospitalier, ne l’arrachent à son inconsolable chagrin. Il n’appartient plus au monde des vivants.

La dernière scène est bouleversante, symbolisant la vie comme une pluie magique de bulles, éphémère. Elle nous accompagne à notre sortie de L’Entrepôt, adoucit notre abattement.

Isabelle Royer

Annette Maignan

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